
THE CHRONOLOGY OF WATER
de Kristen Stewart
The Chronology of Water fait partie des premiers films marqués par une attention minutieuse aux détails, dont la maîtrise impressionne.
Avec un caractère singulier et une esthétique unique, le film affirme une identité forte, composée de segments unis dans un montage acéré, au service du récit d’un chamboulement traumatique.
Adapté du roman éponyme de Lidia Yuknavitch, The Chronology of Water propose une plongée en toute subjectivité pour le spectateur. S’appuyant autant sur les mots que sur la symbolique abyssale de l’eau, le film s’ouvre comme un labyrinthe émotionnel qui se dévoile peu à peu.
Les images en fil d’Ariane, le son immersif et le montage précis servent de clés de lecture, mais l’équilibre de l’œuvre trouve son centre en Imogen Poots, qui incarne Lidia avec intensité et fragilité.
Il ne reste plus qu'à saluer la mise en scène hardie de Kristen Stewart, qui confirme qu’elle est non seulement une actrice formidable, mais sans doute une réalisatrice encore plus prometteuse.
Par Juliette Chéron (du Rialto) - 14/10/25

UN SIMPLE ACCIDENT
De Jafar Panahi
Du rire dans le drame
Pour son nouveau film, Jafar Panahi n'abandonne pas sa plume acérée : il la transforme, encore et toujours, en arme anti-dictatoriale.
Les apparences sont parfois trompeuses. La relativité s'applique ici tant au scénario qu'à l'intention : UN SIMPLE ACCIDENT n'est pas un film de vengeance mais bien un récit empreint de liberté, en quête de justice et de reconstruction post-traumatique.
Le réalisateur, ayant lui-même été victime du pouvoir en marche en Iran, pourrait nous amener à nous interroger quant à la mise en abyme de son passé et de son histoire filmée. Mais c’est là que Jafar nous déjoue, proposant plutôt une catharsis universelle, accessible à tous grâce à ses faux airs de comédie populaire.
Un récit choral où se rencontre une galerie de personnages sans lien apparent, pourtant unis par le souvenir d’un homme invisible : leur tortionnaire de prison.
En jouant sur l’incertitude permanente, le film tisse une toile comique sur fond de tragique, et s’avère excellemment alimenté par une joyeuse bande d’opprimés. Une troupe dont il faut saluer le courage de la participation à ce tournage clandestin ainsi que leurs interprétations contenues et à fleur de peau.
UN SIMPLE ACCIDENT est un grand film altruiste, avec une attention aux détails importante, jusque dans les images... Et si l’espoir d’un avenir radieux transparaissait toujours de l’ombre ?
Par Juliette Chéron (du Rialto) - 01/10/25

NOUVELLE VAGUE
de Richard Linklater
Quand le burlesque se marie à la cinéphilie.
NOUVELLE VAGUE est une pure comédie sur le tournage du classique À bout de souffle de Jean-Luc Godard. Et heureusement ! Le film n’est pas un énième biopic nécrophile, mais bien un regard vif sur une époque qui révolutionna le cinéma.
En ne recherchant pas une adaptation néo-réaliste ou une vaine quête de vérité, l'américain Richard Linklater, reconstitue l’énergie et l’ambiance d’une génération. Il signe ainsi une œuvre intelligible, drôle et accessible à tous les publics.
Derrière une mise en scène à l’apparente simplicité, le film révèle un immense travail de postproduction, plan par plan, pour mieux nous plonger dans le Paris des années 1960. Un véritable tour de force, porté par un trio de jeunes acteurs brillants, imprégnés par leurs modèles sans jamais tomber dans le mimétisme maniériste. NOUVELLE VAGUE est une performance : un bonbon esthétique et artistique à savourer sans modération.
Par Juliette Chéron (du Rialto) - 01/10/25

SIRAT
d'Oliver Laxe
Décrire SIRAT comme un Mad Max en rave party serait juste mais extrêmement réducteur.
Plus philosophique qu'il n'y paraît, le film d'Oliver Laxe nous amène à repenser la notion de liberté au sens large. Sensoriel du scénario à la mise en scène, sensible dans son interprétation, SIRAT est un choc, où l'inattendu vient nous bousculer, repoussant sans cesse les limites du cadre et des conventions.
Analogie contemporaine d'un monde à la dérive (le parallèle est facile avec la situation géopolitique actuelle), l'intrigue nous enferme dans un désert cathartique où les frontières se révèlent plus dangereuses que l'aride étendue.
En choisissant des acteurs non professionnels face à l'icône Sergi López, jouant ici un père célibataire en déroute suite à la fugue de sa fille, le réalisateur vient capter l'essence d'un groupe en marge, dont les limites régissent au spectre étendu du libre arbitre.
Par Juliette Chéron (du Rialto) - 10/09/25
